N'en jetons presque plus ! Trions, reprenons, détournons.
L'essentiel est presque bien dit et redit, en long, en large...
Reprenons serré, de travers, à travers.
Par les moyens d'avenir du présent. Pour le présent de l'avenir.
(OTTO)KARL

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2011-01-02

bataille pour une économie générale

La vie humaine, distincte de l'existence juridique et telle qu'elle a lieu en fait sur un globe isolé dans l'espace céleste, du jour à la nuit, d'une contrée à l'autre, la vie humaine ne peut en aucun cas être limitée aux systèmes fermés qui lui sont assignés dans des conceptions raisonnables. L'immense travail d'abandon, d'écoulement et d'orage qui la constitue pourrait être exprimé en disant qu'elle ne commence qu'avec le déficit de ces systèmes : du moins ce qu'elle admet d'ordre et de réserve n'a-t-il de sens qu'à partir du moment où les forces ordonnées et réservées se libèrent et se perdent pour des fins qui ne peuvent être assujetties à rien dont il soit possible de rendre des comptes. C'est seulement par une telle insubordination, même misérable, que l'espèce humaine cesse d'être isolée dans la splendeur sans condition des choses matérielles.
(G.B.)

(…) Là où il propose un véritable « changement copernicien » des conceptions économiques de base, c'est quand il aperçoit la différence fondamentale entre l'économie d'un système séparé – où règne un sentiment de rareté, de nécessité, où se posent des problèmes de profit, et où la croissance peut toujours sembler possible et désirable – et celle d'une économie qui est celle de la masse vivante dans son ensemble – où l'énergie est toujours en excès et qui doit sans relâche détruire un surcroît. Montrant que l'étude des phénomènes isolés est toujours une abstraction, il propose un effort de synthèse, qui était jusqu'alors sans précédent, par opposition à l'esprit borné des économistes traditionnels qu'il compare à celui « d'un mécanicien qui change une roue ». Vue profonde, qui a fait son chemin car l'on sait la fortune qu'a connu, depuis que ces lignes furent écrites, le terme d'économie généralisée.
(J.P.)

Un excédent doit être dissipé par le moyen d'opérations déficitaires : la dissipation finale ne saurait manquer d'accomplir le mouvement qui anime l'énergie terrestre.
Le contraire apparaît d'habitude pour la raison que l'économie n'est jamais envisagée en général. L'esprit humain en ramène les opérations, dans la science comme dans la vie, à une entité fondée sur le type des systèmes particuliers (des organismes ou des entreprises). L'activité économique, envisagée comme un ensemble, est conçue sur le mode de l'opération particulière, dont la fin est limitée. L'esprit généralise en composant l'ensemble des opérations : la science économique se contente de généraliser la situation isolée, elle borne son objet aux opérations faites en vue d'une fin limitée, celle de l'homme économique ; elle ne prend pas en considération un jeu de l'énergie qu'aucune fin particulière ne limite : le jeu de la matière vivante en général, prise dans le mouvement de la lumière dont elle est l'effet.
(…)
Ces excès de force vive, qui congestionnent localement les économies les plus misérables, sont en effet les plus dangereux facteurs de ruine. Aussi la décongestion fut-elle en tous temps, mais au plus obscur de la conscience, l'objet d'une recherche fiévreuse. Les sociétés anciennes la trouvèrent dans les fêtes ; certaines édifièrent d'admirables monuments, qui n'avaient pas d'utilité ; nous employons l'excédent à multiplier les « services », qui aplanissent la vie, et nous sommes portés à en résorber une partie dans l'augmentation des heures de loisir. Mais ces dérivatifs ont toujours été insuffisants : leur existence en excédent  malgré cela (en de certains points) a voué en tous temps des multitudes d'êtres humains et de grandes quantités de biens utiles aux destructions des guerres. (…)

En conséquence le principe général de l'excédent d'énergie à dépenser, envisagé (par-delà l'intention trop étroite de l'économie) comme effet d'un mouvement qui le dépasse, en même temps qu'il éclaire tragiquement un ensemble de faits, revêt une portée que personne ne peut nier.
(…)
Je préciserai seulement, sans attendre davantage, que l'extension de la croissance exige elle-même le renversement des principes économiques – le renversement de la morale qui les fonde. Passer des perspectives de l'économie restreinte à celles de l'économie générale réalise en vérité un changement copernicien : la mise à l'envers de la pensée – et de la morale.
(G.B.)


cf. le jeu du monde
cf. la dominance et autre usage
cf. in su ici de